Jean Véronis
Aix-en-Provence
(France)


Se connecter à moi sur LinkedIn Me suivre sur Twitter Facebook RSS

lundi, novembre 15, 2010

Lexique: Révolutions

Christine Lagarde nous a fait un peu de linguistique ce matin sur France Info. A la question de la journaliste lui faisant remarquer que le nouveau gouvernement n'a rien de révolutionnaire, elle répond qu'au contraire, il est "totalement révolutionnaire car le principe de la révolution, comme expliqué brillamment par Jean-Louis Bourlanges, c'est que vous faites un tour complet à 360°". J'ai trouvé intéressant au passage que Mme Lagarde cite le président de la Fondation du Centre, que je trouve effectivement brillant, mais auquel je ne connaissais pas ce talent de lexicographe (si des lecteurs savent d'où vient cette citation, je suis preneur).


Christine Lagarde, France-Info, 15-11-2010
envoyé par FranceInfo. - L'info video en direct.

Sur le plan linguistique c'est parfaitement exact. Le mot révolution (du latin revolvere, rouler, ramener en arrière) a été utilisé dès le Moyen-Âge pour désigner le retour d'un astre à son point de départ. L'idée de changement brutal qu'on lui connaît dans le contexte politique n'est apparue que plus tard (probablement sous l'influence anglaise au XVIIe siècle, n'en déplaise aux défenseurs de la pureté de la langue française), mais elle a changé le sens du mot... à 180°. En feignant, sérieuse comme une papesse, d'ignorer cette polysémie, Mme Lagarde nous fait une belle pirouette rhétorique. On prend les mêmes (ou presque) et on recommence, voilà une idée plutôt comique de la révolution !

Ah ces politiques, quel talent pour nous rouler...

13 Commentaires:

Anonymous Emmanuel a écrit...

De toute évidence Mme Lagarde écoute l'Esprit Public le dimanche matin sur France Culture ! Un très bon point pour elle !

15 novembre, 2010 19:18  
Blogger ke a écrit...

Petite faute de frappe : le mot latin est revolvere.

15 novembre, 2010 22:29  
Blogger Jean Véronis a écrit...

Ah, ma vue baisse, merci !

15 novembre, 2010 23:15  
Anonymous David a écrit...

Meilleur Ministre de ce gouvernement

16 novembre, 2010 10:53  
Anonymous Emmanuel a écrit...

M. Bourlanges a fait son petit mot sur la révolution de François Fillon lors d'une intervention à l'émission de Philippe Meyer sur France Culture : http://www.franceculture.com/emission-l-esprit-public-le-remaniement-ministeriel-le-g20-2010-11-14.html

16 novembre, 2010 14:33  
Blogger Jean Véronis a écrit...

Emmanuel> Merci de l'info ! Je vais écouter l'émission, probablement très intéressante.

16 novembre, 2010 14:34  
Anonymous Laurent a écrit...

De l'art de glisser sur les définitions ! Le contexte de la phrase excluait totalement le sens astronomique, lequel s'applique uniquement à la dette publique, que Mme le ministre connaît bien !

http://www.cnrtl.fr/definition/r%C3%A9volution

16 novembre, 2010 14:57  
Anonymous michaël a écrit...

Maurice Béjart avait déjà, en 1989 pour le bicentenaire de la Révolution française, énoncé quelque chose comme : « La révolution, c'est tourner ! »

Une affirmation que l'on peut lui entendre répéter en boucle dans une des musiques composées par Hughes Le Bars pour son spectacle “1789… et nous” (http://www.bejart.ch/fr/1789-et-nous/oeuvres/377).

17 novembre, 2010 03:10  
Anonymous cécile a écrit...

Bonjour,
voir Lacan en 1968, à propos des évènements (je n'ai pas les réferences)

18 novembre, 2010 10:01  
Anonymous Cochonfucius a écrit...

Dans un roman de science-fiction des années 50, un extra-terrestre voit le cadran d'une horloge terrienne, et s'exclame, admiratif:

Vous recyclez le temps!

20 novembre, 2010 17:08  
Blogger Agnès a écrit...

Bonjour,
ce qui est drôle tout de même, c'est que, en astronomie, la révolution correspond au tour complet, à 360 ° donc, qu'exécute un astre autour d'un autre, mais que, quand il s'agit d'un tour sur lui-même, à 360° aussi, on parle de rotation.
La révolution de la Terre est d'un an, sa rotation de 24h.
Cordialement
Agnès
http://doutagogo.com

07 décembre, 2010 06:31  
Blogger olive a écrit...

C. Lagarde affecte peut-être d'ignorer la polysémie des mots, mais surtout, leur histoire, ce qui lui permet de choisir le sens le moins courant : l'«étymologique» (i.e., le plus ancien qui soit attesté et/ou reconstruit). C'est l'un des procédés favoris de la mauvaise foi.

On apprend ça au berceau en philologie classique : fermez les dictionnaires ! L'étymologie d'un mot ne donne jamais son sens dans le texte.

J'arrive un peu tard... Billets et commentaires, c'est toujours aussi bien ici.

06 janvier, 2011 19:10  
Blogger Jean Véronis a écrit...

Pièce détachée> Excellente remarque... Merci d'être passé(e) -- et non, ce n'est jamais trop tard : j'espère que ce blog n'est pas un de ces machins éphémères pour zappeurs pressés !

06 janvier, 2011 19:20  

Enregistrer un commentaire