Texte: Fillon s'anaphorise
Vous avez peut-être remarqué que les discours de François Fillon ressemblent étrangement, ces temps-ci, à ceux de son maître. On dirait un clone linguistique, reprenant les mêmes mots et répétant les mêmes formules que celles de l'hyperprésident...
Ainsi, il pratique désormais l'anaphore massive. En voici un exemple, dans son discours du 4 à Lyon :
Vous souvenez que la semaine dernière je m'étais amusé à trouver un indice mathématique simple permettant de mesurer la proportion d'anaphores dans les discours (voir parties 1, 2, 3). Je l'ai appliqué aux discours de François Fillon depuis le printemps 2004. Voici le résultat (les deux parties du diagramme ont des échelles horizontales différentes : j'ai agrandi les dernières semaines pour les rendre lisibles) :
On voit que dans tout la période qui précède l'élection présidentielle, François Fillon était très raisonnable côté anaphore. L'indice est tout à fait comparable à celui qu'on observe dans les anciens discours de Sarkozy (voir ici) ou dans ceux d'autres personnages politiques (voir ici). Et soudain, au lendemain de son élection, il s'anaphorise — si je puis me permettre ce néologisme.
Aucun doute : le conseiller spécial Henri Guaino est passé par là, laissant d'ailleurs de nombreux autres indices caractéristiques de sa plume (références historiques, etc.).
Alors ? La pensée unique tant critiquée ferait-elle place à la parole unique ? En tout cas, en imposant ainsi son style au plus haut de l'État, Guaino a fait très phore !
Ainsi, il pratique désormais l'anaphore massive. En voici un exemple, dans son discours du 4 à Lyon :
Cette victoire de Nicolas Sarkozy elle est aussi la vôtre.Et tout le discours est sur le même moule (voir ici).
Vous vous êtes reconnus dans les valeurs qu’il a portées parce que la ville des canuts et des soyeux est une ville où l’on chérit le travail, l’effort et le mérite.
Parce que la ville de Jacquard, de Thimonnier et des Frères Lumière est une ville où on aime entreprendre, créer et forger l’avenir.
Parce que la ville d’Ampère et de Mérieux est une ville où on a toujours engagé la bataille de l’intelligence pour conserver une longueur d’avance.
Parce que la ville de l’abbé Pierre est une ville où l’on s’élève contre ce qui porte atteinte à la dignité humaine.
Parce que la ville où est mort Jean Moulin est une ville où on connaît le prix de la liberté.
Parce que la ville de Saint-Exupéry, est une ville où l’on sait se donner les moyens de voler vers ses rêves.
etc.
Vous souvenez que la semaine dernière je m'étais amusé à trouver un indice mathématique simple permettant de mesurer la proportion d'anaphores dans les discours (voir parties 1, 2, 3). Je l'ai appliqué aux discours de François Fillon depuis le printemps 2004. Voici le résultat (les deux parties du diagramme ont des échelles horizontales différentes : j'ai agrandi les dernières semaines pour les rendre lisibles) :
On voit que dans tout la période qui précède l'élection présidentielle, François Fillon était très raisonnable côté anaphore. L'indice est tout à fait comparable à celui qu'on observe dans les anciens discours de Sarkozy (voir ici) ou dans ceux d'autres personnages politiques (voir ici). Et soudain, au lendemain de son élection, il s'anaphorise — si je puis me permettre ce néologisme.
Aucun doute : le conseiller spécial Henri Guaino est passé par là, laissant d'ailleurs de nombreux autres indices caractéristiques de sa plume (références historiques, etc.).
Alors ? La pensée unique tant critiquée ferait-elle place à la parole unique ? En tout cas, en imposant ainsi son style au plus haut de l'État, Guaino a fait très phore !
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12 Commentaires:
Ou alors ils lisent ce Blog ;-) ?
On s'y attendait : c'est l'avènement de la loi du plus anaphore.
Ouais, ben moi ça m'énerve ce nouveau style. Ça a un côté "hyper bien construit", et puis très vite ça ronronne, ça lasse, ça fait De Gaulle, ça fait vieux, ça fait peur.
Bonjour!
Je suis assez d'accord avec Jaguen pour le côté hyper bien construit, c'est le but d'ailleurs ; par contre, je ne trouve pas que ça fasse vieux, les discours bien construits et les phrases bien tournées ne sont (ne devraient pas être) l'apanage du passé... Non, ce qui me gêne, c'est que c'est finalement assez creux...
Je trouve que ces discours font "fabriqués , artificiels.
Mais j'avais surtout retenu la partie "méchante" du discours sur la gauche et ses caramels mous !
J'aurais bien aimé une explication de textes à ce sujet !
anne
Sensibilisé par votre étude de l'anaphore dans les discours de Sarkozy, j'avais aussi remarqué ce changement dans les discours de Fillon.
Le risque avec ce style, c'est qu'il est facile à parodier. On le retrouve d'ailleurs dans une pub IKEA http://www.youtube.com/watch?v=TyMJcQPQZVo&mode=related&search=
Au risque de tomber sous le coup de la loi de Godwin, ça me rappelle une citation...
"Toute propagande efficace doit être limitée à peu d'idées qui, autant que possible, doivent être exprimées en des formules stéréotypées. Ces slogans devraient être constamment répétés jusqu'à ce que tous jusqu'au dernier en soient venus à prendre à son compte l'idée mise en avant."
J'avais été surpris par cette pub ikea sans en analyser la raison.
Effectivement ces anaphores, cette musique et ce ton qui monte ressemblent furieusement aux clips officiels du candidat gagnant.
http://www.youtube.com/watch?v=elQmPAKjWFY
La planete entière demande à Jean Véronis s'il n'aurait pas un programme de décrytage de l'ivresse alcoolique dans les discours de présidents. Il paraitrait en effet que l'un d'eux se serait trouvé dans cette mauvaise posture, mais je ne préfère pas divulguer ici son nom, n'ayant pas de yacht perso pour m'enfuir.
Jaguen ne connaît pas de Gaulle, c'est évident.
L'anaphore, c'est gonflant, c'est tout, c'est au disours politique ce que la techno est à la musique. Sans les filles.
A propos de mon précédent commentaire, la traduction est de moi et n'est pas franchement bonne - je ne dispose que de l'original en allemand. Quelques corrections pour rendre la traduction plus compréhensible et grammaticalement correcte :
"Toute propagande efficace doit être limitée à peu d'idées qui, autant que possible, doivent être exprimées en des formules stéréotypées. Ces slogans devraient être constamment répétés jusqu'à ce que tous les auditeurs jusqu'au dernier en soient venus à prendre à leur compte l'idée mise en avant."
Paris ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré !
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